Du virtuel à la sensation…

Du virtuel à la sensation : la webcam et les réseaux comme générateurs de présences en creux

Auteur: Mélissa BERTRAND ©

CRITIQUES. Regard sur la technologie dans le spectacle vivant. Carnet en ligne de Theatre in Progress avec Comité de lecture:

Critique du « iShow », spectacle du collectif Les Petites Cellules Chaudes, présenté pour la première fois aux Écuries dans le Off du Festival TransAmérique (Montréal), le 30 mai 2012.

Si les technologies sont de plus en plus utilisées dans les spectacles et performances actuels, elles le sont souvent dans un rapport au temps, à l’espace mais aussi au corps : elles le cernent, le redoublent, l’amplifient, le subliment ou le découpent pour en offrir une vision kaléidoscopique. Il existe aussi des médiums technologiques qui viennent à leur manière prolonger le corps sans pour autant l’ancrer dans une réalité redoublée et décuplée qui agirait comme un microscope venant l’analyser, voire l’ausculter. Ils créent – ou rendent perceptible – un espace intermédiaire mais difficile à délimiter.

Cette zone médiane est en partie liée avec la notion de virtualité. Comme le suggère Olivier Asselin dans son article « L’aura de la technologie. Un certain usage de la réalité mixte sur la scène et au musée », le réel et le virtuel ne s’opposent pas mais s’inscrivent plutôt dans un continuum, révélant ce qui est en puissance dans ce qui est, et vice-versa. Le virtuel est même ce qui permet au sujet de se dédoubler et d’ouvrir sa perception, ce que remarque Bernard Andrieu dans son texte « Les avatars du corps ». Les technologies font apparaître des aspects du corps potentiels ou du moins qui ne se manifestent pas matériellement mais qui existent bel et bien. L’utilisation de technologies du quotidien, comme les webcams et réseaux sociaux, placent les performances qui y font recours du côté de la banalité – ce sont des technologies ordinaires, connues de tous – qui inspire cependant une quête de sensationnel souvent associée à la culture populaire (télé-réalité, défis viraux sur les réseaux sociaux, vie parallèle au travers d’un avatar sur une plateforme quelconque…). L’usage des dispositifs de la vie courante joue essentiellement sur ce déroulement des possibles permis par le virtuel. Dans cette optique, ce qui est recherché semble se trouver dans les effets produits par la rencontre du corps et des nouvelles technologies. Alors que ces dernières sont souvent associées au trucage ou à la machinerie des effets spéciaux spectaculaires, le manque de cadrage ou l’utilisation volontairement décontractée d’un médium comme la webcam nous font penser la technique comme témoin d’un quotidien non-artificiel, sans mise en scène, en bref, authentique. Lire la suite de Du virtuel à la sensation…